Pour la première fois, cette année, alors que je collectais l’ensemble des cadeaux à distribuer, je me suis rendu compte qu’il y avait un nombre important de petits paquets blancs, roses, violets, bleus, jaunes. Plein de petits carrés colorés. Je me suis approché pour voir de quoi il s’agissait, j’ai mis mes lunettes sur mon nez et j’ai lu : “serviettes x 12”, “tampons”, “protège-slips”. “Tiens donc, j’ai pensé, je n’en avais jamais vu en vrai”.
Vous devez vous dire “Il est un peu à la masse, le père Noël”. Alors oui, je reconnais qu’à mon âge, j’aurais pu avoir vu un paquet de serviettes ou de tampons. Mais non. Ni dans les cadeaux de Noël, ni nulle part.
J’ai donc tapé “règles” dans la barre de recherche de mon navigateur, pour me renseigner. Je suis tombé sur le site de Règles Élémentaires, où on parle de “tabou des règles”. Est-ce que c’était ça, le tabou des règles ? De n’avoir jamais vu un paquet de serviettes de toute ma vie ? Que la mère noël ou mes enfants, n’aient jamais osé me dire “Papa Noël, achète-moi des tampons” ou se sentent à l’aise de se promener avec leur paquet à la main.
En lisant, en relisant la page d’accueil du site, j’étais un peu choqué, très concerné. Il y avait une expression qui revenait : “précarité menstruelle”. Précarité… Quoi ? Menstruelle ? Alors c’était ça tous les paquets colorés ? Des cadeaux pour toutes les femmes qui ne pouvaient pas, à l’année, acheter autant de paquets que nécessaire ?
Bientôt, je n’étais plus seulement choqué et concerné, mais complètement révolté. Moi, Père Noël, 90 ans, star de la pop culture et citoyen, je ne comprends pas que les protections périodiques ne soient pas gratuites pour toutes les personnes qui en ont besoin. Je ne comprends pas que ça devienne un cadeau. Je ne comprends pas qu’on ne puisse pas parler des règles librement. Je ne comprends pas pourquoi il m’aura fallu 90 ans pour me poser toutes ces questions.
90 ans, c’est peu à l’échelle de l’histoire, mais croyez-moi, j’en ai vu des choses. Ce que j’aimerais voir, maintenant et sans plus tarder, c’est la fin de la précarité menstruelle et du tabou des règles.
Prenez soin de vous et des autres,
Père Noël